Fin du monde, fin du mois – Revisiter notre manière de faire de l’écologie

Vendredi 23 août, nos stagiaires Camille et Justine se sont rendues à Vertpop, la rencontre annuelle d’été d’Etopia. Dans ce cadre, elles ont pu assister à la conférence « Fin du monde, fin du mois. Revisiter notre manière de faire de l’écologie« . Le vécu et les engagements des trois intervenant•es ont résonné à la fois avec leurs intérêts personnels, mais également dans leurs missions et observations en tant que stagiaires chez les Amis de la Terre. Elles vous partagent leurs réflexions dans ce deuxième épisode des Stagiaires Embarquées.

D’un point de vue personnel, notre engagement écologique a globalement commencé par une démarche individuelle, à l’adolescence, suite à une prise de conscience de la responsabilité de l’humain dans le changement climatique. Cependant, les années passant, l’arrivée dans la vie étudiante a fait basculer cet engagement vers des revendications écologiques plus politiques, au-delà de notre sphère privée. Étant toutes les deux des étudiantes françaises en sciences politiques, l’idée de la nécessité de mesures écologistes à une échelle globale, de par leur impact mais également la responsabilité différenciée des différents groupes sociaux nous est apparue comme une évidence.

De fait, allier « fin du monde » et « fin du mois » a été un virage naturel dans nos réflexions personnelles et militantes, tout en étant toujours en recherche de façons de l’appliquer concrètement dans nos luttes. En tant que stagiaires, il nous est aussi apparu comme intéressant d’y réfléchir, pour penser le futur des Amis de la Terre. En effet, l’association peut parfois être identifiée comme trop peu liée, dans ses pratiques et dans ses membres, aux enjeux de justice sociale. Que cela soit vrai ou non, il apparaît comme important de penser les années à venir comme un moyen pour les Amis de la Terre de réorienter ses façon de réfléchir, d’agir et de communiquer, et donc d’agrandir la diversité de son public.

conférence_vert_pop

De fait, plusieurs points nous sont apparus comme essentiels à l’issue de cette conférence qui mettait en discussion Marie Gobert, militante Gilets Jaunes, Zoé Genot, ancienne sénatrice et ancienne députée Écolo ainsi que Brieuc Wathelet, coordinateur de la campagne TAM TAM et plaidoyer politique chez Solidaris :

  • Il est nécessaire de créer des outils et programmes qui partent des attentes des concerné•es.

Les intervenant•es ont évoqué comme exemple l’échec de la politique « Good Move » de la ville de Bruxelles. Dans le même ordre d’idées, les Amis de la Terre ont par exemple engagé des évènements en lien avec d’autres associations comme Lutte Solidarité Travail (LST) ou Présence et Action Culturelle (PAC). La réflexion avec ces associations et leurs membres peut permettre à l’asbl d’évoluer dans ce sens. Aussi, la nécessité de lieux de rencontre informels et discussions sont à prioriser afin d’interroger les besoins de chacun•e. L’asbl propose déjà des groupes de réflexion et pourrait continuer dans cette voix afin de renouveler et d’élargir son public.

  •  Sortir du simple discours de l’écologie comme résultat d’une simple « volonté individuelle » et de la politique des petits gestes comme seul moyen d’action

Si ces façons d’agir restent importantes et adaptées à certaines personnes, elles ne peuvent être l’unique façon de se considérer comme écologiste et peuvent même apparaître comme discriminantes. C’est dans cet objectif que, à côté de la thématique de la simplicité volontaire, l’association travaille de plus en plus, et doit continuer à parler de thématiques comme l’écoféminisme ou la décroissance dont l’aspect systémique et politique est indéniable.

  •  La nécessité de créer de nouveaux discours et imaginaires inclusifs pour tous•tes

Afin de parler à tous•tes et répondre aux besoins d’un cercle plus élargi, avec lui et selon ses besoins, le discours de l’association doit être clair. Ainsi, ce piège d’un jargon que l’on connaît trop car faisant partie de notre travail ne doit pas conduire nos actions à exclure par le langage. Je (Camille) me suis moi même rendue compte de ce biais en construisant une réflexion autour d’un future outil de formation où le vocabulaire que j’employais n’était pas compréhensible. Il est donc toujours important de se questionner sur ce point.

De plus, certains mots et concepts peuvent apparaître comme négatifs (décroissance, consommer moins) et être difficiles à exposer comme des imaginaires désirables. Cette idée nous a rappelé l’intervention de Gérard Pirotton lors du forum « La décroissance en questions » organisé par l’ASBL le 6 juillet dernier. En effet, dans sa présentation « Décoder les discours et interroger nos habitudes, Approche cognitive du langage et communication« , il nous expliquait que le cerveau n’aimait pas les négations: « essayez de ne pas penser à un éléphant. » En lisant cette phrase, la plupart d’entre vous auront pensé à un éléphant alors que la consigne exige le contraire, rejoignant l’idée de la nécessité d’invoquer des représentations apparaissant comme enviables. C’est autour de ces constats qu’une réflexion a déjà commencé autour de la création de nouveaux imaginaires moins hors-sol au sein de l’asbl.

Il est donc urgent que les discours écologistes renouent avec nos luttes, nos quotidiens et nos difficultés. En effet, l’écologie n’est pas qu’une problématique externe ou de « développement durable » : elle est l’histoire de nos vécus, de celle du vivant dans sa globalité et des générations futures. Pour cela, l’écologie ne peut être que populaire, féministe, décoloniale.

Justine et Camille