Les scientifiques Timothée Parrique, Kate Raworth et Vincent Liegey et les organisations European Environmental Bureau, Friends of the Earth Europe, Wellbeing Economy Alliance et European Youth Forum répondent à la Commission européenne avec un nouveau plaidoyer en faveur d’une Europe post-croissance permettant à tou·tes de vivre dignement dans les limites planétaires.
Voici un résumé de l’échange :
La panacée de l’UE contre l’effondrement écologique est la « croissance durable » ou « verte » : la conviction que l’innovation technologique permettrait une expansion économique continue compatible avec la biocapacité de notre planète. Pourtant, la recherche scientifique démystifie clairement ce récit, montrant au contraire qu’une nouvelle croissance du PIB dans les pays à revenu élevé accroît les inégalités sociales, affecte la qualité de vie et menace les systèmes de survie. En d’autres termes, échanger le bien-être contre du profit. Le décalage entre les affirmations de l’UE selon lesquelles elle est sur la bonne voie et la littérature scientifique est frappant :
« Il faudrait en moyenne plus de 220 ans à ces pays [à revenu élevé] pour réduire leurs émissions [de CO₂] de 95 %, émettant ainsi 27 fois leur part équitable restante de 1,5°C. »
Le nombre d’acteur·rices s’unissant derrière cette science augmente rapidement, y compris les récents rapports de l’Agence européenne pour l’environnement et du Service de recherche du Parlement européen , invitant collectivement la Commission à reconsidérer sa stratégie si elle souhaite sérieusement une transition juste pour lutter contre la dégradation environnementale qui s’intensifie rapidement à travers le monde.
Au début de la conférence du Parlement européen Beyond Growth (Au-delà de la croissance) en mai 2023, une lettre ouverte, signée, entre autres, par les Amis de la Terre, a été envoyée aux dirigeants de l’UE, soutenue par plus de 150 organisations de la société civile et plus de 250 expert·es dans le domaine des sciences et de l’économie de l’environnement. En août, de hauts représentant·es de la Commission européenne ont envoyé une réponse à nos collègues de Friends of the Earth Europe.
Dans leur réponse, les représentant·es de la Commission ont fièrement décrit le travail accompli par l’UE en matière de politique environnementale au cours de la législature actuelle, mais ont surestimé le potentiel des politiques actuelles en proposant des solutions socialement injustes, fondées sur le marché et en mettant en avant les politiques d’économie circulaire axées sur les entreprises mais refusant de s’attaquer à la surconsommation systémique. Ils·elles continuent de considérer la croissance et la compétitivité comme des résultats souhaités de la politique environnementale et plus tard, il déforme également les résultats de la conférence Beyond Growth, en déclarant que « un certain nombre d’intervenant·es à la conférence (…) ont expliqué les conditions en vertu desquelles la croissance est durable ». En fait, la majorité des intervenant·es ont exposé avec rigueur pourquoi la croissance durable est un conte de fées et se sont concentré·es sur la voie à suivre, tandis que la plupart des intervenant·es défendant le statu quo représentaient la Commission européenne.
Les auteur·rices de la lettre ne sont pas d’accord et exhortent l’Union européenne et ses États membres à assumer leur responsabilité mondiale, compte tenu de son impact environnemental historique et de son potentiel à proposer de nouvelles solutions aujourd’hui. Ils·elles sont fermement convaincu·es qu’un cadre européen assorti d’objectifs contraignants et fondés sur la science en matière de réduction de l’empreinte matérielle peut être efficace pour créer une économie européenne régénératrice, comme le réclament les scientifiques , les ONG , plusieurs États membres de l’UE (en particulier l’Autriche) et le Parlement européen .
L’Europe de l’après-croissance dont nous avons besoin et que nous méritons dispose d’un European Green Deal (Pacte Vert européen) phare au-delà de la croissance, qui intègre l’engagement de l’UE en faveur d’une approche de changement systémique pour créer un avenir dans lequel nous prospérons tous dans les limites planétaires. Soutenu·es par plus de 400 organisations de la société civile et universitaires, ils·elles réaffirment le besoin de politiques fondées sur quatre piliers essentiels :
- le respect de la biocapacité,
- l’équité,
- le bien-être de tous et
- la démocratie active.
Nous avons besoin d’une nouvelle relation avec la croissance – une relation dans laquelle nous nous demandons ce qui doit croître, pourquoi et pendant combien de temps ; une croissance dans laquelle toute croissance vise à améliorer le bien-être humain ou la santé planétaire.
Lisez leur réponse complète ici
Article original en anglais sur le site de Friends of the Earth Europe
Crédit photo : Image by Ralph from Pixabay