Moins c’est plus, ou les vertus de la décroissance

La démarche de la Simplicité Volontaire (SV) ou, au choix, de Sobriété heureuse consiste à s’appliquer, individuellement et avec le soutien d’un groupe, l’objectif de renoncer à une logique de surconsommation et d’accumulation afin de pouvoir se (re)centrer sur «l’être plutôt que l’avoir».

Le défi à relever est de renverser la logique de croissance aveugle plutôt que de s’évertuer à vouloir l’encadrer, l’accompagner, l’aménager dans l’espoir d’en atténuer les conséquences les plus néfastes. Il s’agit dès lors, même si le mot fait souvent peur, de s’inscrire dans une logique de décroissance ou « moins c’est plus ».

Utiliser moins de temps, d’argent, d’énergie, de santé à consommer et à s’agiter/s’épuiser pour s’en donner les moyens, c’est retrouver plus de temps, d’argent, d’énergie et de santé à consacrer à des activités tellement plus gratifiantes en bonheur, pour soi et pour les autres.

La simplicité volontaire, quelques pistes

  1. Retarder les achats de bien et de service de quelques jours pour s’assurer que l’on en a vraiment besoin;
  2. À défaut de faire son propre potager, acheter, si possible, directement aux producteurs (p.ex via les groupes d’achats communs ou ‘GAC’, en allant au marché plutôt qu’au super marché ou en s’abonnant à un service de ‘panier’), des aliments saisonniers, produits localement (p.ex pourquoi acheter des fromages produits à l’étranger alors que notre pays offre une extraordinaire palette de fromages locaux) dans le respect de la « terre » et cuisinés à la maison !
  3. Adopter un mode de vie épanouissant et non stressant et une alimentation saine (bio), ainsi qu’un travail intérieur et spirituel pour assurer un maximum d’autonomie (prévention des maladies) et de parcimonie dans la consommation des biens et des services médicaux;
  4. Ne plus faire reposer son image et son estime de soi et sa sécurité intérieure sur la possession et l’exhibition de tel ou tel vêtement (marque ou style), ou de tel ou tel objet ; se dégager de la tyrannie du « paraître »;
  5. Modifier son mode de vie pour réduire les besoins de mobilité individuelle: rapprocher le domicile du lieu de travail, se rapprocher des circuits de transport en commun, privilégier la consommation locale de biens et services, s’interroger en profondeur sur la distinction entre les besoins essentiels et accessoires de déplacement, notamment en matière de loisir et de vie sociale;
  6. Dégager des espaces-temps pour l’essentiel: une occasion unique d’apprentissage, de développement personnel et d’acte de solidarité, par une véritable rencontre avec soi-même – qui suppose du silence, de la lenteur, de la solitude parfois, du temps de respiration ou le contact avec la nature, … et avec l’autre – qui suppose aussi une disponibilité, une réceptivité, une ouverture intérieure … incompatibles avec la course à l’activité et à l’exotisme;
  7. Évaluer l’impact écologique de son habitat (matériaux de construction, d’équipement et de décoration, consommation d’énergie);
  8. S’interroger sur la place et la nature de la (sur)activité professionnelle; ne participe-t-elle pas d’une logique de «surconsommation» ressentie comme obligée et contrainte par les circonstances extérieures, alors qu’elle est en réalité largement consentie pour «remplir un vide»? Se demander d’autre part, si cette suractivité n’est pas la conséquence obligée de la logique de «surconsommation» matérielle qui engage de façon durable dans des dépenses telles qu’il faille obligatoirement travailler beaucoup pour assurer un revenu suffisant y compris jusqu’à sacrifier sa santé, sa vie personnelle, familiale et sociale et finalement son bonheur pour finalement «perdre sa vie à la gagner»;
  9. Partager (tondeuse à gazon, échelle, outils…) pour résister à l’omniprésent besoin de «propriété individuelle», source de surconsommation et de gaspillage.

Quelques réflexions encore pour conclure …

  • Être radical dans ses objectifs et évolutif dans ses engagements;
  • S’inscrire dans la démarche de SV suppose que l’on cherche à atteindre au quotidien une cohérence entre ses convictions, ses paroles, ses décisions et ses actes dans les différents secteurs de sa vie.

Mais on vit dans une société et aussi, dans une certaine mesure, un environnement familial, professionnel, social… qui fonctionne largement à contre-courant de ces convictions. On a aussi sa propre histoire, marquée pendant plus ou moins longtemps par des fonctionnements plus ou moins éloignés des valeurs de la SV et qui peuvent encore conditionner, malgré nous, la réalité de vie d’aujourd’hui. Quelle que soit la détermination de chacun, la marge de manœoeuvre reste plus ou moins contrainte et limitée, pour faire évoluer sa vie vers l’idéal de la SV

S’informer

L’engagement dans la SV commence par un devoir d’information (pas toujours simple dans un monde où l’information est pléthorique et dont la pertinence est souvent difficile à apprécier) pour pouvoir poser les choix les plus pertinents, donner un maximum de sens à son engagement, élaborer des convictions fondées et une pensée personnelle, indépendante et critique.

La SV : une démarche individuelle… avec le soutien d’un groupe

S’engager dans la vie quotidienne sur la voie de la SV conduit inévitablement à se trouver souvent dans une position de résistance ou de marginalité par rapport à la société dans laquelle on évolue quotidiennement. C’est pourquoi il est essentiel de pouvoir bénéficier du soutien d’un groupe (voir d’un réseau comme le Réseau Québécois de Simplicité Volontaire) de personnes engagées dans la même démarche et avec qui on peut échanger ses pratiques et ses réflexions pour progresser davantage dans cet engagement. Il peut aussi être utile d’adhérer et de soutenir les associations qui soutiennent la SV comme p.ex les Amis de la Terre qui ont, en Belgique largement contribué à soutenir cette démarche.

La SV ne suffit pas : spiritualité et engagement dans l’action collective

Face à l’ampleur et la gravité des problèmes évoqués au début de cette note, la démarche de la SV propose une démarche concrète inscrite dans des groupes. Mais cette démarche, qui concerne avant tout les comportements et les actes individuels, aussi importante soit-elle, est souvent ressentie comme limitée. C’est pourquoi pour pouvoir donner sa pleine mesure, il est sans doute souhaitable qu’elle soit articulée à deux autres démarches complémentaires:

  • un travail intérieur d’ordre spirituel d’une part, et
  • l’engagement dans l’action collective, d’autre part (par ex. les Amis de la Terre).

Un dernier commentaire s’avère nécessaire. Il est en effet important de distinguer sans ambiguïté «Simplicité Volontaire» et «Simplicité Imposée». Adhérer à la SV c’est aussi s’engager au côté de ceux que la société a abandonné (chômeurs, petits pensionnés, sdf, mères isolées…) pour que les moyens leur soient donnés de retrouver une vie décente incluant l’accès à une alimentation, un logement, un confort, des loisirs… respectant leur dignité humaine.